Alexander Goehr est né en
1932 à Berlin. Il emménagea avec ses parents en Grande-Bretagne alors qu’il
n’était qu’un nourrisson. Avec une mère pianiste et un père chef d’orchestre
qui reçut les enseignements de Schoenberg, Goehr baigne dans la musique depuis
qu’il est enfant. C’est donc sans surprise qu’il étudie la composition au Royal
Manchester College of Music.
Ecouter la première de la
Symphonie de Turangalila écrite par Messiaen dirigée par son père fut comme une
révélation pour lui. Messiaen était l’homme qu’il lui fallait pour pouvoir
apprendre davantage. C’est pourquoi Goehr partit suivre ses cours au
Conservatoire National de Paris en 1955-1956.
« Quand un élève de
sa classe voulait lui montrer une œuvre, il devait prévoir de rester après la
classe. C’est ce que je fis une fois afin de lui soumettre une œuvre pour
orchestre que j’avais composée en Angleterre, l’année précédente. Il l’examina
soigneusement, s’arrêtant sur quelques détails qui nécessitaient plus
d’attention. Puis, il s’excusa : « Je regrette de ne pouvoir composer une
musique comme celle-là » ou « de ce style ». Je ne me suis jamais senti si
petit de ma vie et considérais sa réponse comme un rejet poli mais total »
raconte Alexander Goehr lorsqu’il se rappelle de ses années passées à
Paris. Pour Messiaen, « dans la
musique comme dans la nature, vous devez percevoir un détail avec précision,
jusqu’à le mesurer, mais toujours situer son effet à l’intérieur de la totalité
du mouvement ».
Plus tard, ce fut au tour
d’Alexander Goehr d’enseigner, et notamment à George Benjamin. « Ce
n’était pas chose facile de prendre comme étudiant, quelqu’un qui avait auparavant
été avec le Maître à Paris. Quand je faisais une remarque sur une partition,
George pouvait dire : « Mais le Maître a dit… ». Que pouvais-je répondre ! », se souvient Alexander Goehr. Mais c’est avec
« plaisir » et « fierté » qu’Alexander Goehr apprit à cet
élève ce qu’il connaissait. George Benjamin est depuis devenu « un magnifique
compositeur et un bon ami ».
Pour en revenir à
l’univers d’Alexander Goehr, l’intérêt qu’il porte dans la musique du passé n’a
rien à voir avec ce qu’on peut appeler du conservatisme musical. Il est plutôt
le signe d’une exploration sans cesse renouvelée de ses propres racines
musicales. La musique du passé ne disparaît pas, selon lui, au profit de la
recherché d’un langage musical innovant. De plus, avec les années, ce qu’Olivier
Messiaen a pu lui enseigner semble « désormais clair dans mon esprit et a
plus d’importance pour moi qu’à l’époque où il le fit ».