lundi 12 mai 2014

Une interview... Roland Hayrabedian


Festival Messiaen:
     Parmi les nombreuses formations orchestrales et vocales, que vous avez dirigées, quel moment reste le plus fort ?

Roland Hayrabedian:
     Je parlerai des œuvres qui m’ont marquées et qui continuent de me marquer plutôt que des formations. La formation que j’ai toujours préférée c’est Musicatreize.
Mais j’ai dirigé beaucoup d’autres choses.
Quand je dirige à Radio France je suis toujours ravi, mais je préfère vous parler des œuvres que j’ai dirigé qui m’ont marquées. Il y a beaucoup de pièces de Maurice Ohana; j’ai été assez proche de ce compositeur mort en 1992. J’ai enregistré énormément sa musique et j’ai toujours eu beaucoup de plaisir à le faire, quelques soient l’orchestre et les chanteurs avec lesquels j’ai travaillé.
Plus récemment, j’ai énormément travaillé avec le compositeur Zad Moultaka, un franco-libanais né en France, qui a une façon de faire la musique très particulière. J’aime beaucoup cette musique. Je travaille également avec le franco-grec Alexandro Markeas. Vous verrez vite dans ce parcours que Ohana, Markeas et Moultaka sont des méditerranéens et on un rapport avec une forme de la vocalité qui m’intéresse.

On peut faire un lien avec le festival de la Meije, bien entendu. Olivier Messiaen n’est pas un méditerranéen. Par contre Jean-Louis Florentz, lui, est allé chercher son altération en Ethiopie. Il y a quelque chose d’assez fort dans cette relation. Par exemple, concernant Florentz, j’ai souvent dirigé Asmara au Maroc en sa présence. 
Il y a quelque chose d’assez proche entre tous ces compositeurs que j’affectionne particulièrement. 

Quant à Messiaen c’est quelqu’un que j’ai beaucoup dirigé notamment notamment Les  Cinq Rechants, mais pas seulement. J’ai fait aussi  Des Canyons aux étoiles avec le festival d’Avignon et c’est la première fois que je ferais Les Trois Petites Liturgies de la Présence Divine.
Olivier Messiaen est un compositeur qui a été un quasi contemporain de Ohana et qui a marqué toute cette génération. C’est indéniable parce qu’il y avait une couleur, un sens orchestrale assez formidable dans ses compositions.

Festival Messiaen: 
     Pouvez-vous nous parler de Musicatreize, projet que vous avez créé en 1987 ?

Roland Hayrabedian:
     Musicatreize, je l’avais créé pour faire un ensemble à douze chanteurs solistes, mais ça s’est élargi très vite à des instrumentistes, car je travaille beaucoup avec des instrumentistes. Parfois on peut être 16, 24 et même plus.
Le concept était autour de 12. Musicatreize ça voulait dire 12 chanteurs plus moi. Mais, finalement, cela devient un terme générique qui ne veut plus dire ceci, car je travaille avec un volant de chanteurs et d’instrumentistes qui est beaucoup plus large que 12. Nous faisons beaucoup de musique de scène, beaucoup de théâtre musical. 

Ce qui m’a particulièrement touché ces dernières années? La Symphonie de Psaumes de Stravinsky, pour au moins 50 chanteurs. Les formes sont donc extrêmement variées et libres.

Festival Messiaen: 
     De 2002 à 2005, vous avez été le Directeur musical de l’Orchestre des Jeunes de la Méditerranée. Comment avez-vous vécu cette expérience ?

Roland Hayrabedian:
     Pour moi ce fût été une expérience très importante, une période très heureuse parce que ce projet m’a permis de côtoyer de jeunes musiciens qui, d’ailleurs, pour certains, se sont retrouvés dans Musicatreize ensuite. J’ai beaucoup tourné avec cet ensemble dans tout le bassin Méditerranéen et cela a été une période incroyable car les jeunes musiciens donnent une énergie absolument fantastique. Nous ne sommes pas dans un rapport professionnel direct. C’est une sorte de stage d’été dans lequel ils se retrouvent. Pour moi il n’y a pas ce rapport qui peut être conflictuel avec l'argent, puisque ils sont vraiment là pour faire la musique. Nous avons réalisé des choses formidables avec eux: enregistré un disque, ainsi que des concerts partout dans les pays du Magreb et en Italie, en Espagne. J’ai visité aussi beaucoup de pays pour recruter ces jeunes musiciens puisqu’ils viennent de tout le bassin Méditerranéen.

Festival Messiaen: 
     Aimez-vous votre rôle d’enseignement au CNR de Marseille, et que vous apporte-t-il ?

Roland Hayrabedian:

     Cela m’apporte beaucoup ! J’aime beaucoup faire ça, et cela me permet de ne pas perdre contact avec la réalité. On apprend beaucoup des autres et donc quand on est enseignant on apprend beaucoup de ses étudiants. Comme j’enseigne la direction, j’ai acquis une maîtrise dans cette discipline, mais qui vient à la fois du fait que je fais beaucoup de choses par ailleurs. Je suis un enseignant qui pratique et en même temps ma réflexion se nourrit aussi de cette réflexion pédagogique. Cela m’apporte beaucoup dans mon travail professionnel quand je dirige et quand je fais travailler des groupes professionnels.
Je pense que si nous n’avons pas ce rapport-là, on perd vite le contact et on peut devenir quelqu’un d’absolument déconnecté de la réalité.

Festival Messiaen: 
     Comment vous envisager votre participation au festival Messiaen 2014 ?


Roland Hayrabedian:

     Pour moi, c’est un moment fort, car cette production a été très difficile à monter car elle est assez onéreuse. Et c’est un moment fort d’autant que je suis natif de Briançon. J’ai été baptisé et j'ai fait ma première communion dans cette église où je vais pour la première fois diriger des œuvres. 

On a une relation avec ce festival qui est n’est pas récente. Avec l'ensemble Musicatreize, nous sommes venus souvent au Festival Messiaen. Nous aimons retrouver ce festival pour pouvoir y jouer ces musiques qui sont emblématiques du XXème siècle. Ce ne sont pas des créations récentes, mais des pièces maîtresses et essentielles. Le fait d’avoir un lien à travers Messiaen et tout ce que propose Gaëtan Puaud, à La Grave, c’est quelque chose de très important et formidable dans ces Alpes un peu perdues !

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